Histoire pour les papas

Mise en ligne Sep 21, 2014 par Etoile du Matin dans Coin Enfants

Histoire pour les papas … 

   Cette lettre, d’un auteur anonyme, a su toucher mon cœur de papa, saura-t-elle aussi attendrir le tien ? 

   Mon cher enfant, je ne sais si un jour j’aurai le courage de te faire lire ce que j’écris ce soir, mais je ne puis attendre plus longtemps pour exprimer à la fin de cette journée quelque peu orageuse ce que je pense et ce que je ressens à ton sujet. Tout à l’heure, j’ai voulu te le dire et je suis allé dans ta chambre, un peu à tâtons, éclairé par quelques rayons de lune. Mais tu dormais déjà. C’était peut-être mieux ainsi.

   C’est que, vois-tu, je ne suis pas content de moi. Dès ce matin, je me suis fâché contre toi. Je t’ai grondé pendant que tu t’habillais pour aller à l’école, parce que tu te lavais juste le bout du nez comme les petits chats. Puis, je me suis irrité parce que tu n’avais pas ciré tes souliers ; je me suis mis en colère lorsque j’ai vu, dans ta chambre, plusieurs objets traînant à terre au lieu d’être soigneusement rangés dans ton armoire ; puis ma colère a redoublé quand j’ai remarqué que tu allais être en retard à l’école et que, pourtant, tu ne faisais rien pour te dépêcher davantage.

   A midi, tu es revenu, nous nous sommes mis à table et je t’ai grondé parce que tu répandais des miettes de pain autour de toi, que tu avalais tes aliments sans les mâcher, que tu mettais tes coudes sur la table et que tu étalais sur ton pain une couche de beurre vraiment exagérée. Le repas terminé, tu es retourné à l’école en me disant gentiment : « Au revoir, papa ! » Et pour toute réponse, je t’ai jeté un regard sévère en disant : « Tiens-toi donc un peu plus droit, je t’en prie ! »

   Dans la soirée, les choses ne sont pas allées beaucoup mieux. Quand je suis rentré du travail, tu jouais aux billes avec quelques camarades devant la maison. Tu t’étais presque couché à plat ventre sur le trottoir, et j’ai vu que ton pantalon était tout sale, que les manches de ton tablier étaient presque trouées aux coudes et que tes chaussettes étaient descendues sur tes chaussures. Je t’ai humilié devant tes petits amis en te faisant filer devant moi et en criant : « Tu ne te rends pas compte que les vêtements coûtent cher ? Si tu devais les acheter toi-même, tu ferais un peu plus attention ! »

   Lorsqu’il fut l’heure d’aller te coucher, j’étais au salon, lisant mon journal. Tu as ouvert la porte tout doucement, tu as jeté dans la pièce un regard peu rassuré et moi, irrité d’être interrompu, je t’ai regardé par-dessus la feuille déployée et je me suis écrié : « Il n’y a donc pas moyen d’avoir la paix avec ce gamin-là ! » Tu n’as rien dit, bien sûr, mais à tout vitesse, tu as traversé la pièce, tu as jeté tes bras autour de mon cou, tu m’as embrassé, tu m’as dit : « Bonne nuit, papa ! » et tu es parti très vite.

   Eh bien mon fils, c’est quelques moments après cela que mon journal m’est tombé des mains et que, sans que je sache comment, une crainte terrible s’est emparée de moi en comprenant tout à coup que j’avais pris l’habitude d’être égoïste, de me plaindre de tout, de te gronder pour presque rien, et de ne trouver que cela pour te faire sentir que tu es mon petit garçon. Ce n’est pas que je ne t’aime pas, bien au contraire, mais j’exige de toi plus que tu ne peux me donner et te juge du point de vue d’une grande personne et non de celui d’un enfant. Tu ne mérites pas, mon fils, d’être traité comme je l’ai fait aujourd’hui. Tu m’as montré ce soir que tu avais un grand cœur, car tu es venu m’embrasser gentiment malgré toutes mes gronderies. Alors, après avoir longtemps réfléchi, je suis monté dans ta chambre et là, au clair de lune, en regardant ton visage calme, si confiant, j’ai décidé d’être dès maintenant un vrai papa, de m’occuper de toi, de rire avec toi, de souffrir quand tu auras mal, de me mordre la langue quand je sentirai qu’un mot d’impatience va franchir mes lèvres, et surtout de me souvenir que tu es un enfant, un petit enfant, et pas encore une grande personne, et qu’il faut beaucoup de patience pour conduire un petit garçon dans les chemins difficiles de la vie.

Anonyme.