Etoile du matin

Le corbeau mort

Mise en ligne Sep 22, 2014 par Etoile du Matin dans Coin Enfants
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Le corbeau mort

   L’homme qui a fait le sujet de ce récit n’était qu’un pauvre tisserand, vivant dans une petite ville du Wupperthal en Prusse ; un pauvre homme au point de vue de sa position sociale, mais riche en Dieu et bien connu dans son voisinage par sa grande confiance au Seigneur. Sa foi constante s’exprimait par une expression qui lui était devenue habituelle dans les circonstances de trouble et de perplexité : « Le Seigneur aide » avait-il coutume de dire ; et il le disait intrépidement, même lorsque le Seigneur semblait l’avoir oublié. Et un pareil moment était arrivé ; un temps de disette ; le travail était rare, beaucoup de mains étaient inoccupées, et le maître par qui le tisserand était employé lui donna son congé. Après avoir fait d’inutiles démarches pour garder sa place, il dit enfin : « Eh bien le Seigneur aide », et retourna chez lui. Sa femme, à l’ouïe de la mauvaise nouvelle se lamenta terriblement ; mais son mari essaya de la calmer avec son assurance habituelle. « Le Seigneur aide », dit-il ; et même lorsque, les jours passant l’un après l’autre, sans apporter de changement, la pauvreté les fit souffrir, rien ne put ébranler la ferme confiance qu’il avait en Celui sur lequel il s’appuyait. A la fin, le jour arriva où il n’y eu plus un sou à la maison, ni pain, ni bois ; ils n’avaient plus en vue que la faim. Sa femme nettoyait tristement la chambre qu’ils habitaient, au rez-de-chaussée. La fenêtre était ouverte, et on entendait probablement les paroles que prononçait le tisserand pour tâcher de maintenir leur courage : « Le Seigneur aide ». Il passait justement un petit coureur de rues qui regarda effrontément dans la chambre, et jeta en même temps un corbeau mort aux pieds de l’homme pieux, en criant : « Voilà, saint homme, quelque chose à manger pour vous ! »

   Le tisserand releva le corbeau mort, et, lissant ses plumes, il dit d’un air de compassion : « Pauvre créature ! tu dois être mort de faim. » En recherchant s’il avait le jabot vide, il sentit quelque chose de dur, et désirant connaître la cause de la mort de l’oiseau, il commença par l’examiner. Quelle fut sa surprise lorsque, ouvrant le gosier, un collier d’or tomba dans sa main. Sa femme le regardait confondue ; le tisserand s’écria : « Le Seigneur aide », et en toute hâte, il porta le collier chez le plus proche bijoutier, lui raconta comment il l’avait trouvé, et reçu avec joie deux écus que le bijoutier lui prêta pour le présent besoin.

   Le bijoutier nettoya bientôt le joyau, et reconnu qu’il l’avait vu auparavant. « Dois-je vous dire quel est le propriétaire du collier ? » demanda-t-il au tisserand lorsqu’il passa de nouveau chez lui. « Oui, » répondit ce dernier joyeusement ; « car je voudrais bien le rendre à celui qui l’a perdu. »

   Mais quel sujet n’eut-il pas d’admirer les voies merveilleuses de Dieu lorsque le bijoutier prononça le nom de son maître, le fabricant qui l’avait congédié. Il prit aussitôt le collier et se rendit chez son ancien patron. Dans la famille de ce dernier, cette découverte produisit une grande joie, car le soupçon qu’on avait sur une servante fut dissipé. Mais le marchand fut honteux et touché ; il n’avait pas oublié les paroles prononcées par l’homme pauvre, lorsqu’il lui avait donné son congé. « Oui », dit-il d’un air pensif et avec bonté, « le Seigneur aide ; et maintenant, vous ne retournerez pas seulement à la maison richement récompensé, mais je ne veux plus laisser sans ouvrage un ouvrier si fidèle et si pieux, que le Seigneur soutenait et aidait d’une manière si merveilleuse. Vous ne serez plus dans la gène. »

   C’est ainsi que Celui qui nourrit Elie par le moyen de corbeaux vivants, montra qu’il pouvait soutenir son serviteur dans l’épreuve et le délivrer, même par cet oiseau mort.