Les fenêtres en or

Mise en ligne Sep 21, 2014 par Etoile du Matin dans Coin Enfants

 

   « Oh, là là ! » s’exclama Ruth avec impatience, tout en mettant en ordre la bibliothèque. « Je voudrais tant que nous ayons bientôt une nouvelle moquette. Je n’ai jamais aimé celle-ci, et maintenant qu’elle est fanée et usée, elle est tout simplement affreuse. J’ai le cafard à chaque fois que je la regarde. »

   « Et bien, puisque tu dis que nous ne pouvons pas en avoir une nouvelle tout de suite, pourquoi la regardes-tu ? » demanda tante Rachel en souriant. « Il existe un grand nombre de choses désagréables dans notre vie – nous devons y faire face chaque jour – et pour certaines d’entre elles, il nous est impossible de les éviter. Si nous persistons à y penser et nous en plaignons à chaque instant, nous nous rendrons malheureux, ainsi que tous ceux qui nous entourent.

   « Il me semble que nous devrions apprendre une leçon des abeilles. J’ai lu que lorsque quelque chose d’extrêmement désagréable s’introduit dans la ruche et qu’il leur est impossible de la faire disparaître, elles se mettent au travail afin de la recouvrir de cire. Elles l’enferment tout simplement dans une cellule hermétique, et n’y pensent plus. N’est-ce pas là une manière très sage de gérer nos contrariétés et nos difficultés ?

   « Quelqu’un m’a envoyé une carte postale, l’autre jour, avec cette phrase : “ Le secret du bonheur ne se trouve pas en faisant ce que l’on aime, mais en aimant ce que l’on fait. ” Ce n’est pas seulement en ayant et en faisant ce qu’on aime, mais en étant déterminé à faire de son mieux face à l’inévitable, que l’on trouve le bonheur. Lorsque tu découvres une chose désagréable dans ta vie, qui ne peut être supprimée, apprend à l’enfermer hermétiquement, et à l’oublier.

   « Et puis je pense que bien souvent, voir les choses sous un autre angle est une aide. Tu te souviens de l’histoire des fenêtres en or, n’est-ce pas ? Un petit garçon qui n’avait que peu de belles choses dans sa maison, parce que ses parents étaient pauvres, avait l’habitude de s’asseoir sur le pas de sa porte au coucher du soleil, et regardait avec nostalgie la grande maison située au sommet de la colline en face. Quelle belle maison ! Toutes ses fenêtres étaient en or, brillant avec tant d’ardeur qu’il clignait souvent des yeux en les regardant. “ Si seulement notre maison était aussi belle, ” disait-il. “ Cela ne me dérangerait pas d’avoir des vêtements raccommodés et de n’avoir que du pain et du lait pour le dîner. ”

   « Un après-midi, son père lui ayant dit qu’il pouvait faire ce qu’il voulait, il descendit tranquillement la colline, et remonta le long chemin de celle en face de sa maison. Il allait enfin voir la maison aux fenêtres en or. Mais en arrivant au sommet il s’arrêta avec consternation ; ses lèvres commencèrent à trembler, ses yeux se remplirent de larmes. Les fenêtres n’étaient pas en or – mais simplement des fenêtres tout comme les siennes. “ Je pensais que ta maison avait de belles fenêtres en or ” dit-il à la petite fille qui se trouvait sur la pelouse.

   « “ Oh, non ! ” répondit-elle ; “ ça ne vaut pas la peine de regarder à nos fenêtres, mais viens à côté de moi et tu verras une jolie maison qui possède vraiment des fenêtres en or. Tu la vois ? ” Le petit garçon regarda. “ Mais, c’est ma maison, ” dit-il, “ et je ne savais pas qu’elle avait des fenêtres en or ! ”

   « Tu vois, tout dépend de notre regard sur les choses. Je suis maintenant une vieille femme, ma chérie, et j’en viens à penser que les vies les plus héroïques sont vécues par ceux qui mettent de côté leurs propres contrariétés et leurs difficultés, et qui s’efforcent par tous les moyens possibles de soulager le fardeau du monde ; qui laissent derrière eux l’influence d’un esprit brave, joyeux et aimant. »


   « Laissez venir à moi les petits enfants, et ne les en empêchez pas ; car le royaume de Dieu est pour ceux qui leur ressemblent. » Marc 10 : 14.