Etoile du matin

Mademoiselle Ahn

Mise en ligne Sep 22, 2014 par Etoile du Matin dans Coin Enfants
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Mademoiselle Ahn,

l’enseignante qui ne voulait pas faire de compromis

   « Melle Ahn, Melle Ahn, où êtes-vous ? » Tap, tap, tap, faisaient les talons de la directrice alors qu’elle s’approchait de la classe de Melle Ahn. Elle était à sa recherche.

   Melle Ahn était dans sa classe, et regardait par la fenêtre la cour de l’école où les étudiantes étaient assemblées parce que c’était le premier du mois. En Corée, durant les années 1930, les Japonais étaient à la tête du pays, et ils avaient donné l’ordre que le premier jour de chaque mois tout le monde devait se retrouver à un autel et adorer Amaterasu Omikami, la déesse du soleil. Melle Ahn était chrétienne et l’école où elle se trouvait était une école chrétienne pour filles. La directrice était également chrétienne, ainsi que la plupart des élèves. Cependant, comme le gouvernement avait ordonné que tout le monde, y compris les élèves, devaient se rendre au sommet de la montagne et adorer dans les bois au sanctuaire d’Omikami, les élèves et les enseignantes se préparaient à y aller.

   « Melle Ahn, où êtes-vous ? » Le son des talons se rapprochait. La directrice inspectait les classes pour s’assurer qu’aucun élève ne s’y cachait pour ne pas se rendre au sanctuaire. Les enseignantes vérifiaient les toilettes, mais la directrice cherchait particulièrement Melle Ahn parce qu’elle ne l’avait pas trouvée dans la cour.

   La directrice entra dans la salle de classe. « Eh bien, Melle Ahn, je vous trouve enfin. Ne savez-vous pas que c’est le premier jour du mois ? » Bien sûr, elle le savait. « Nous devons partir, et je sais que vous ne voulez pas y aller. Je ne le veux pas non plus. Je suis chrétienne, les enseignantes sont toutes chrétiennes, la plupart des élèves le sont également, et aucun de nous ne souhaite y aller, mais nous le devons. Si nous n’allons pas, ils fermeront l’école. Venez-vous, Melle Ahn ? »

   Melle Ahn ne répondant pas, elle continua : « Vous êtes très égoïste, Melle Ahn. Vous mettez vos idées et ce que vous voulez avant les besoins de l’école. Il nous faut rester ouverts, et après tout, nous n’adorons pas cette déesse dans notre cœur. »

   Melle Ahn soupira et dit : « Bien, je viens. » Et elle sortit.

   La directrice la suivit et dit : « Et vous adorerez, n’est-ce pas, Melle Ahn ? »

   Melle Ahn ne répondit rien. Elle descendit l’escalier et se dirigea vers la cour. Toutes les élèves la virent et certaines commencèrent à chuchoter : “ Melle Ahn vient ! Certainement, le Seigneur prendra soin de nous maintenant.”

   Dès qu’elle prit place parmi ses élèves, ils commencèrent à monter en direction de l’autel. Les étudiants de sept autres écoles étaient déjà réunis, et l’école de Melle Ahn était la dernière arrivée. Tous les avaient attendus. Les enfants furent mis en rangs et chacun se tenait parfaitement aligné. Aucun bruit ne se faisait entendre, pas même un chuchotement, et tout le monde se tenait bien droit. Les dirigeants Japonais étaient présents, et personne ne voulait avoir de problèmes avec eux, car ils savaient trop bien ce que cela pouvait impliquer, et Melle Ahn autant que les autres. De nombreux chrétiens avaient déjà été arrêtés, blessés et traités rudement sous les lois Japonaises – missionnaires, prédicateurs, diacres – peu importait. S’ils n’adoraient pas au sanctuaire, ils étaient arrêtés.

   Melle Ahn priait en gravissant la montagne. Elle voulait faire ce qui était juste, mais elle sentait sa faiblesse. Une fois arrivés à l’autel, tout le monde se plaça. Le dirigeant Japonais cria : « Attention ! » et tout le monde se tint plus droit encore. Chaque élève était parfaitement aligné avec celui ou celle qui le précédait ; tous les rangs étaient droits. Chaque pied était placé correctement. Puis l’ordre fut donné de se prosterner devant la déesse. Ils devaient se prosterner profondément, à partir de la taille, et tout le monde le fit. Tout le monde… sauf Melle Ahn. Elle se tenait droite, et regardait le ciel. Elle savait que les dés étaient jetés, qu’elle allait être arrêtée, probablement dès son retour à l’école.

   En descendant la montagne, elle se dit qu’elle avait fait le bon choix, mais son estomac faisait quand même des siennes et ses jambes tremblaient. Elle se rappela la promesse de Jésus : « Mais, quand on vous livrera, ne vous inquiétez ni de la manière dont vous parlerez ne de ce que vous direz : ce que vous aurez à dire vous sera donné à l’heure même » (Matt. 10 : 19) et cela la remplit de courage. A son retour à l’école, quatre détectives Japonais l’attendaient. Ils l’arrêtèrent, l’escortèrent au poste de police, et la dirigèrent vers une pièce afin qu’elle y soit interrogée par un officier. Elle s’assit, et la porte fut fermée.

   L’homme assis au bureau fulminait ; ses yeux reposaient sur Melle Ahn « Qui pensez-vous que vous êtes, femme insensée ?! Pensez-vous pouvoir nous défier ?! Savez-vous ce que nous pouvons vous faire ? »

   Bien évidemment, Melle Ahn le savait. Elle avait entendu de nombreuses histoires de ce qui arrivait aux prisonniers. Elle resta assise, tremblant et priant, et le téléphone sonna.

   L’officier répondit et dit d’une voix toute différente, « Oui, monsieur… Oui, monsieur… OUI, Monsieur. » Il raccrocha et se tourna sur sa chaise vers une armoire derrière lui. Melle Ahn pouvait voir que ses mains tremblaient alors qu’il passait en revue les dossiers, cherchant celui qu’il désirait. Finalement, il en sortit un… et quitta la pièce !

   Et Melle Ahn pensa : Je peux partir aussi ! Elle se leva donc, et partit ! Elle fit de son mieux pour avoir une démarche normale alors qu’elle traversait le bureau, bien que ses jambes semblaient de coton, mais dès qu’elle eut quitté le bâtiment, elle se mit à courir. Elle courut jusqu’à la maison. Elle traversa les rues, ne s’inquiétant pas de qui pouvait la regarder. Elle courut, sachant que bientôt tous les policiers seraient à sa recherche. Dans le bureau elle avait prié pour que Dieu l’aide, et cette porte s’était ouverte pour elle, alors elle y était passée en courant ! Mais lorsqu’elle arriva à la maison, la porte était fermée à clef. Elle frappa et frappa encore jusqu’à ce que sa mère vienne lui ouvrir, les pieds nus. La mère commença à pleurer et dit : « Nous avons prié pour toi. Entre, entre ! »

   Une fois à l’intérieur, Melle Ahn raconta à sa mère ce qui s’était passé, et sa mère dit : « Il te faut partir immédiatement. » Alors Melle Ahn frotta de la cendre sur son visage et ses mains afin d’avoir l’apparence de quelqu’un ayant travaillé toute la journée à l’extérieur. Elle mit des vieux vêtements de paysans, de vieilles chaussures, habituellement portées par les pauvres. Sa mère emballa quelques vêtements propres et sa Bible dans un morceau de tissu, et Melle Ahn sortit. Elle se dirigea vers la station de train. Un train était sur le point de partir. C’était un train de marchandise, avec de nombreux wagons de marchandises, mais le dernier wagon était pour des voyageurs. Melle Ahn se faufila dans le wagon, trouva une place assise, et pria pour qu’aucun policier ne s’y installe. Aucun policier n’entra dans le wagon cette fois là, mais ce train s’arrêtait à chaque station sur le chemin de Shin Ei Joo. A chaque station, Melle Ahn devenait plus tendue et ne se relaxait que lorsque le train repartait sans qu’aucun policier ne soit entré dans son wagon. Alors que le train se dirigeait vers Shin Ei Joo, Melle Ahn regardait par la fenêtre le ciel étoilé. C’était le même ciel paisible et serein que la nuit précédente, et pourtant, ce soir, il était différent. Elle était fugitive, et se demanda si quelqu’un, là haut dans le ciel étoilé était conscient de ce qui lui arrivait. Elle savait que Dieu et Jésus le savaient, mais malgré cela, elle se sentait terriblement seule. Elle ne savait pas ce qu’elle devait faire.

   Finalement le train arriva à Shin Ei Joo, et Melle Ahn descendit. Rappelez-vous, elle était habillée en paysanne. Son visage et ses mains étaient sales. Elle pensa que les toilettes seraient un endroit approprié pour passer le restant de la nuit, mais elles étaient froides car elles n’étaient pas chauffées. Shin Ei Joo est près de la frontière Mandchoue, et bien que le printemps était à ses débuts, les nuits étaient encore très fraîches. Chaque larme semblait geler sur ses joues, alors elle décida d’aller dans le hall où il faisait un peu meilleur. Elle se lava le mieux qu’elle put, se changea, et trouva un endroit un peu éloigné des gens et là, pria pour la protection divine. Avant de s’endormir, elle se rappela qu’elle connaissait quelqu’un à Shin Ei Joo ! Une de ses anciennes élèves y habitait ! Le matin, elle appela Kyung, qui vint tout de suite la chercher pour la ramener dans sa maison chauffée.

   Kyung était chrétienne, et Melle Ahn lui demanda ce qu’il en était des chrétiens à Shin Ei Joo. Restaient-ils fidèles à Dieu, ou bien adoraient-ils aux autels Japonais ? Kyung répondit : « Eh bien, certains ont fui, et d’autres adorent. »

   « Où en es-tu Kyung ? »

   « Eh bien, je ne vais plus à l’église, mais dans mon cœur je suis toujours chrétienne. » (Gardez cela à l’esprit pour plus tard.) — Kyung avait cessé d’aller à l’église à cause des persécutions contre les chrétiens. Melle Ahn réalisa qu’elle ne pourrait pas rester avec Kyung très longtemps, parce que c’était dangereux pour toutes les deux. Elle appela donc sa sœur et fit tout son possible pour aller vivre avec elle.

   Melle Ahn prit un autre train pour atteindre la maison de sa sœur à Jung Joo, au pied d’une série de montagnes, et il lui fallut aller de nuit parce qu’il y avait moins de risque de rencontrer la police. Lorsqu’elle arriva à Jung Joo, sa sœur l’attendait dans la pénombre près d’un bâtiment. De là, elles se dirigèrent tranquillement vers la maison où sa mère les attendait déjà.

   Aussi longtemps qu’elle évitait le contact avec les voisins, tout se passa bien pour Melle Ahn chez sa sœur, mais elle savait qu’elle ne pourrait pas rester très longtemps non plus. Les voisins étaient curieux. Alors, elle et sa mère cherchèrent un endroit où vivre un peu plus retiré dans la campagne. Elles découvrirent une jolie petite hutte en chaume dont personnes ne voulait – le propriétaire précédent et son fils étaient morts de tuberculose dans cette hutte, et personne ne voulait y vivre. En fait, personne ne s’en approchait. C’était parfait pour Melle Ahn et sa mère, mais tout d’abord il fallut la nettoyer à fond, refaire les murs et le sol avant de s’y installer.

   Melle Ahn savait que sa mère et elle y seraient en sécurité, du moins pour un certain temps. Chaque soir après le coucher du soleil, sa sœur venait leur apporter la nourriture pour le jour suivant, et c’est ainsi qu’elles vécurent. Durant cette période de temps, Melle Ahn mémorisa des passages des Ecritures et des cantiques, car elle savait qu’à moins d’un miracle, elle serait un jour arrêtée, et elle voulait être capable de chanter et de se rappeler la Parole de Dieu. Elle aimait aussi passer du temps à l’extérieur dans la nature — un ruisseau bondissait tout près et la beauté de la forêt n’était pas éloignée.

   Un jour, elle remarqua qu’une femme étrangère marchait lentement dans le village. Tout de suite Melle Ahn se tint en alerte car elle savait qu’on devait savoir qu’elle était recherchée. Elle se demanda si cette personne était une espionne à la recherche de quelque chose. Melle Ahn revint à la maison et en parla à sa mère. Toutes les deux décidèrent de rester à l’intérieur, mais apprirent finalement que cette personne était Mme Chang. Mme Chang était une chrétienne appartenant à une église où un autel avait été amené et placé sur l’estrade. Toute personne arrivant dans l’église devait se prosterner devant l’autel avant d’offrir son propre service de culte. Les membres pouvaient librement venir et adorer dans leur église, mais il leur fallait auparavant se prosterner devant l’autel. Certaines personnes le firent, mais pas Mme Chang. Elle dit qu’elle ne pourrait jamais renier son Seigneur de cette manière, et elle partit, devenant une fugitive dans les montagnes. Elle était toute seule et se déplaçait d’un endroit à l’autre. Elle allait dans les petits villages pauvres des montagnes et là, elle parlait aux gens du Père céleste et du don de Jésus-Christ, et de la possibilité qu’a chacun de devenir fils ou fille de Dieu. Les pauvres villageois n’avaient jamais entendu pareille chose auparavant, — Mme Chang était devenue une évangéliste ! Cependant, les villages étaient très pauvres, et Mme Chang n’avait aucun moyen d’acheter de la nourriture. Elle ne possédait pas d’argent. Elle pouvait manger uniquement ce que les villageois partageaient avec elle, et qu’une seule fois par jour. Malgré cela, Mme Chang était forte et pleine de courage.

   « Combien j’aurais aimé que vous soyez avec moi dans les montagnes ! » dit-elle. « Vous auriez pu entendre les croyants des montagnes prier et chanter en l’honneur de notre Père céleste. Vous auriez visité avec moi les grottes où les pasteurs, les évangélistes, les diacres et les croyants se retrouvent tous. Quelle foi ! Leurs visages sont illuminés d’amour pour Dieu. Peu leur importe de se retrouver dans des grottes ou de se cacher dans les montagnes ou encore d’être dans la peur constante d’une arrestation. J’ai été tellement bénie d’être simplement avec eux. » Partager avec Mme Chang fut un vrai encouragement pour Melle Ahn et sa mère.

   Peu de temps après avoir rencontré Mme Chang, un soir après que le soleil se soit couché, on frappa à la porte, doucement mais fermement. Ce bruit réveilla les deux femmes. Qui pouvait-ce bien être ? Etaient-elles en danger ? La mère de Melle Ahn alluma une bougie et se dirigea vers la porte. Elle demanda : « Qui est là ? »

   Dans le calme de la nuit un murmure arriva à son oreille : « C’est le diacre Lee. Mme Chang m’a demandé de venir vous voir. »

   Elles ouvrirent rapidement la porte et laissèrent entrer le diacre Lee. Ses vêtements étaient élimés et rapiécés. Sa barbe était longue et hirsute. Souvenez-vous, ces gens étaient poursuivis et n’avaient aucun moyen de prendre soin d’eux ou de remplacer leurs vêtements usés. Ils ne pouvaient même pas acheter de la nourriture. Le diacre Lee avait tellement faim. Il dit : « Cela fait tellement longtemps que je n’ai pas mangé. Parfois je passe une semaine sans manger. »

   Alors elles firent ce que vous auriez vous même fait, j’en suis sûre – elles lui donnèrent tout ce que la sœur de Melle Ahn avait apporté pour le jour suivant.

   Melle Ahn dit plus tard : « J’aurais aimé que vous l’ayez vu manger. Il a mangé, …et mangé… et mangé ! » Et il ne restait plus de nourriture, mais ça ne faisait rien parce que le diacre Lee aimait Dieu, et il était dans le besoin.

   Le diacre Lee leur dit plus tard : « J’ai quitté mon église et mon village il y a deux ans. En été, c’est plus facile parce que la forêt apporte une protection, et il fait plus chaud, mais en hiver, il fait très froid et c’est la période la plus difficile pour moi. Je trouve une grotte ou un endroit où habiter. J’aimerais que vous ayez pu connaître les gens que j’ai rencontrés dans les grottes et les forêts. Nous n’avons pas beaucoup de nourriture. Il nous faut ramasser des racines, c’est ce que nous mangeons ; nous buvons l’eau des ruisseaux, mais nous sommes forts ! Et nous sommes rapides ! et nous allons de l’avant ! C’est parce que Dieu nous fortifie. »

   Garçons et filles, nous ne savons pas où nous serons demain, ou la semaine prochaine, ou l’année prochaine. Il se peut qu’il y ait un temps où nous aurons uniquement du pain à manger et de l’eau à boire, mais Dieu nous fortifiera ! Nous serons peut-être maigres, et nos vêtements seront peut-être élimés, mais cela n’aura pas d’importance, si Dieu est avec nous ; le ciel sera à notre secours, et cela nous rendra joyeux. Dieu nous aidera – comme Il a aidé Melle Ahn, Mme Chang et le diacre Lee.

   Vous souvenez-vous que dans notre histoire il y avait quelque chose à se rappeler ? La directrice de l’école de Melle Ahn — était-elle une vraie chrétienne ou portait-elle uniquement le nom de chrétien ? Jésus dit que si nous le renions sur la terre, il nous reniera devant son Père et devant les anges du ciel, et Jésus ne peut renier un vrai chrétien. Vous rappelez-vous de Kyung ? Elle avait arrêté d’aller à l’église et n’avait pas fui, alors, adorait-elle à l’autel de l’idole ? Melle Ahn ne put pas rester avec Kyung car c’était trop risqué pour elle. Si quelqu’un trahit Dieu et Jésus, il ou elle peut également vous trahir. Vous ne trouverez jamais la sécurité parmi ceux qui font des compromis avec leur foi. Vous ne serez en sécurité qu’avec Jésus-Christ et avec Ses disciples qui le suivent jusqu’au bout.